Îles Féroé, terres sauvages

Encore peu connues des voyageurs, les îles Féroé dessinent des étendues sauvages à perte de vue, riches de pépites gastronomiques qui poussent depuis peu ce territoire préservé sous les feux de la rampe. Florilège des adresses coups de cœur de ces îles indomptées.

Par Pauline Blanchard

Se dressant au beau milieu de l’Atlantique nord, nichées entre les côtes de l’Islande, de l’Écosse et de la Norvège, les Féroé s’élèvent en un archipel de 18 îles, écrins rocheux à l’abri du monde. Moutons et vallons d’herbes à l’infini, routes sinueuses traçant leurs sillons anthracite au cœur des plaines et vent iodé portent la beauté de ces îlots rattachés au Danemark. Forts de leur histoire riche et de leur culture préservée depuis des siècles grâce à leur isolement géographique, les Féroïens, détenteurs de leur propre langue, parlent fièrement de la beauté sauvage de leurs îles, et se font les émissaires d’un art de vivre de la survie intimement lié à leur environnement abrupt.

C’est par le prisme de sa gastronomie, avec entre autres l’avènement du restaurant Koks, couronné de deux étoiles au guide Michelin, que ce territoire a commencé à attirer les curieux en quête de frissons gustatifs. Offrant la promesse d’une véritable déconnexion et d’un retour au plus près de la nature, les îles Féroé sortent peu à peu de l’ombre. Sélection de nos spots fétiches pour un voyage privilégié en terre (encore) inconnue.

Hôtel Havgrim

Posé au bord de l’océan, bordé de pâturages ondoyants, le boutique-hôtel Havgrim accueille les globe-trotteurs entre vagues écumeuses et moutons tranquilles, à deux pas du centre-ville. Dans l’intimité cosy de ses douze chambres, on se repose des longues balades entamées dans les plaines rocheuses et l’on profite du spectacle de l’onde qui lèche les abords des lieux. Au petit déjeuner, face au paysage s’ouvrant devant soi, on sirote un thé dont l’eau bleutée se mêle aux ondulations cobalt de l’océan, apaisé ou déchaîné, selon les vibrations du temps. Un havre de paix pour des nuits paisibles et des matins opalins.

Hôtel Havgrim, Yvir við Strond 14, Tórshavn.
@hotelhavgrim

Gásadalur

C’est peut-être le spot le plus photographié des Féroé. À juste titre, puisque le panorama de ce village perché entre océan et montagne a de quoi impressionner. Posé en bord de falaise, arborant une vingtaine de toits anthracite entourés par des graminées dorées par la fin du jour, le village repose au-dessus d’une cascade se noyant dans l’écume. On s’y promène dans les herbes folles bordant les hauteurs, près des moutons et de leurs bergers descendant les montagnes environnantes. Dernier village isolé de l’archipel – sans route reliée à lui jusqu’en 2004, il fallait alors accomplir une marche de quelques heures ou prendre l’hélicoptère pour y accéder –, Gásadalur est accessible par un tunnel creusé dans la montagne. En haute saison, un petit café permet aussi de déguster un chocolat crémeux à l’abri du vent. À découvrir au coucher ou au lever de soleil, pour un moment magique à la hauteur de la beauté des lieux.

Gásadalur, île de Vágar.

Áarstova

À Tinganes, le plus ancien quartier de la capitale et des îles, les maisonnettes en bois se sont transformées en spots pour gastronomes avertis. À la lueur des bougies, dans une atmosphère feutrée et chaleureuse, entre plancher noueux et poutres boisées, on sert à Áarstova le meilleur de la cuisine traditionnelle du pays. Du pain au levain fait maison accompagné d’un divin nuage de beurre caramélisé et salé, une bisque de langoustine, crème et huile d’aneth ou encore un morceau de lieu fondant, brillant comme un coquillage, enveloppé d’une purée de panais, d’herbes fraîches et de radis croquants. Des saveurs subtiles, des accords délicats et des produits frais ; la trinité réunie d’un repas farouchement réussi.

Áarstova, Gongin 1, Tórshavn.
aarstova.fo
@aarstovaheimaihavn

Ræst

Inauguré il y a plus de trois ans, Ræst est le premier restaurant des Féroé entièrement dédié à la méthode de la fermentation. Dans un registre culinaire plus accessible que son voisin Koks, Ræst met à l’honneur la cuisine de survie ayant nourri les Féroïens isolés du monde pendant plusieurs siècles. C’est l’air salé et vigoureux balayant les terres qui donne les conditions idéales d’un séchage au vent et recouvre poissons et viandes d’une couche fermentée au goût puissant. Dans l’atmosphère tamisée du lieu, on vient enhardir ses papilles et goûter de l’agneau fermenté sucré de navets goûteux, du cabillaud enrobé de chou ou encore un porridge de rhubarbe nourrie d’une crème de romarin caramélisé. Une invitation à découvrir l’authentique cuisine du pays façonnée par sa relation intime aux ressources naturelles.

Ræst, Gongin 8, Tórshavn.
raest.fo
@raestrestaurant

Guðrun & Guðrun

Cofondée par deux Féroïennes passionnées de mode, Guðrun Ludvig et Guðrun Rógvadóttir, la boutique Guðrun & Guðrun recèle de merveilles aux mailles dans lesquelles on rêve de s’emmitoufler pour affronter le froid vivifiant du bord de mer. Entre motifs traditionnels féroïens et lignes contemporaines, ces créations lainées sont tricotées à la main avec une matière première sourcée localement, pour des lainages biologiques, durables et respectueux de l’environnement. Incarnant la tradition féroïenne – l’art d’assembler la laine est un hobby  partagé par toutes les générations –, ces pulls devenus trendy grâce à la série danoise The Killing se retrouvent dans les concept stores les plus pointus d’Europe et du Japon. Le parfait souvenir, à la fois intemporel et responsable, à ramener dans ses bagages.

Guðrun & Guðrun, Niels Finsensgøta 13, Tórshavn.
www.gudrungudrun.com
@gudrungudrun_

Koks

Couronné de sa deuxième étoile Michelin en 2018, Koks, plus qu’un simple restaurant, est le phénomène par lequel la lumière s’est posée sur les Féroé, attirant les foodies en quête d’une expérience immersive au cœur de la nature. Menée par son chef Poul Andrias Ziska, la brigade de cet écrin boisé – des cabanes traditionnelles posées au bord d’un lac – décline une cuisine pure, à la fois authentique et contemporaine, ultra locale et calquée aux oscillations de la nature. Résultat : le goût des paysages féroïens dans les assiettes sublimées par le vent iodé, les légumes-racines, les mets fermentés et autres oursins pêchés du matin. Au menu, noix de Saint-Jacques, sarrasin frit et cresson ou glace au thym sauvage de l’Arctique, pickles de baies et crème fumée. Toute la diversité des Féroé dans un dîner de maestro joué à la manière d’une partition sublime.

Koks, Frammi við Gjónna, Leynavatn.
koks.fo
@koks_restaurant