Intérieur : chez les fondateurs de Poudre Organic dans un ancien tribunal

Couple bourguignon à l’origine de la marque Poudre Organic, Manon et Quentin ont quitté Auxerre en 2021 pour élire domicile avec leurs quatre filles dans ce qui fut l’ancien tribunal d’Avallon. Un choix de vie délibéré à l’entrée du parc naturel régional du Morvan, dont ils savourent chaque jour la quiétude et la qualité de vie, en adéquation avec leurs aspirations personnelles.

Par Hélène Lahalle – Photographies : Marine Burucoa

Depuis dix ans, Poudre Organic décline un vestiaire intemporel fait de basiques éthiques pour la famille et la maison, confectionnés avec soin au Portugal dans des matières naturelles issues de l’agriculture biologique. La marque est alignée avec les aspirations de Manon et Quentin, consommer moins mais mieux : « Poudre Organic est le reflet de notre aventure personnelle. À la maison, c’est courses en vrac, achat local et réduction des déchets. Quoi de plus normal que de l’appliquer à son entreprise ? » Une philosophie qui va de pair avec la recherche d’une certaine qualité de vie. Aussi, lorsque l’opportunité d’acquérir l’ancien tribunal d’Avallon (devenu galerie d’art en 2011) se présente en novembre 2020, le couple n’hésite pas une seconde à la saisir depuis Porto, où il vient de s’installer pour un an en tribu. Sachant cette parenthèse portugaise provisoire et voulant quitter Auxerre à leur retour, ils ont à l’esprit de trouver un projet immobilier hors du commun, lorsqu’ils tombent par hasard sur l’annonce du palais de justice. « Sur un site de biens atypiques, j’ai immédiatement reconnu le lieu. On était clients de la galerie d’art et surtout fans de l’endroit, où l’on venait régulièrement depuis dix ans. À chaque fois, on se projetait en se disant que ce serait dingue de faire une maison ici. En décembre on visitait le bien en visio et on signait le compromis, et en juin on était de retour pour signer », se souvient Quentin.

On a vraiment tenu à s’adapter au lieu et non l’inverse. On ne voulait surtout pas le dénaturer et tout cloisonner, mais plutôt tirer parti des volumes existants.

Une tribu en son tribunal

Dès lors, Manon, Quentin, Madeleine 17 ans, Suzanne 14 ans, Brune 9 ans et Billie 3 ans investissent la bâtisse aux volumes généreux, mettant un point d’honneur à en respecter l’essence architecturale : « On a vraiment tenu à s’adapter au lieu et non l’inverse. On ne voulait surtout pas le dénaturer et tout cloisonner, mais plutôt tirer parti des volumes existants. » Ainsi, l’accès à la maison se fait toujours par le hall d’entrée du rez-de-chaussée, autrefois salle des pas perdus. De là, un bel escalier central mène à l’ancienne salle d’audience, muée en pièce à vivre comprenant salon, cuisine et salle à manger. La pièce favorite de la famille, où l’on distingue encore au sol les traces de la barre des témoins : « La salle vitrail comme on l’appelle, est notre pièce de vie, centrale dans la maison. Tout tourne autour de la cuisine dans notre quotidien. On adore cuisiner et manger ici, le repas est le meilleur moment de la journée pour nous six et en plus, quand le soleil perce le vitrail, c’est juste dingue… » Au même niveau se trouvent les bureaux de Poudre Organic, en lieu et place de l’ancien bureau du juge, où subsiste encore la corde qui servait à sonner la fin des délibérations. Le premier étage, desservi par un autre escalier et autrefois dédié aux bureaux et à l’administration, abrite les chambres de Suzanne et Madeleine, et le second, jadis salle des archives, accueille désormais la suite parentale et les chambres de Brune et Billie.

Et s’il n’était pas question de dénaturer le lieu, il a tout de même fallu le rénover : « Les murs étaient recouverts de fibre de verre, toute l’électricité était à mettre aux normes et il n’y avait pas de système de chauffage. On a dû revoir les espaces, séparer des pièces, en créer d’autres, et construire l’estrade du salon, passage obligé pour adapter la salle d’audience en lieu de vie moderne et accueillant et faire passer les écoulements d’eau de la cuisine. Sinon, on a fait refaire des portes à l’identique de ce qu’elles étaient, décloisonné l’escalier principal, et refait toutes les peintures. » Les sols, faits de pierre de Bourgogne, de tomettes hexagonales et de parquet en chêne, ont été conservés. Manon et Quentin ont aussi été vigilants aux matériaux utilisés, un principe ancré dans leur réflexion globale, optant pour des fenêtres en bois de fabrication française et une chaudière à granulés alimentée par du bois du Morvan.

(c) Marine Burucoa pour HOME Magazine

Le vide ne nous gêne pas. L’accumulation de pièces qui n’ont pas de sens, si.

Palais de justesse

Pour faire de ce lieu initialement public une habitation familiale qui leur ressemble, Manon et Quentin ont choisi de ne pas faire appel à un architecte, mais de prendre le temps nécessaire pour tout décider eux-mêmes, à leur rythme, épaulés par des artisans de la région : « Au total, ce fut un peu plus d’un an de travaux, à vivre quotidiennement avec les entrepreneurs, qui ont été géniaux. On aime réfléchir aux espaces en fonction de nos habitudes de vie. L’avantage, c’est qu’on était sur place pour pouvoir échanger avec les équipes au quotidien. » Reste à décorer l’endroit pour le rendre chaleureux, ce qui comme le reste se fait petit à petit : « Notre déco est faite d’une accumulation de coups de cœur, acquis depuis qu’on a commencé notre vie ensemble. 20 ans de chine, de cadeaux… Notre lustre Maman de Seletti a permis de bien habiller l’espace, comme notre Togo ou nos chaises Tolix, qui nous suivent depuis 15 ans. Pour le reste, tout est question de mélange de matériaux : du bois dans la majorité des pièces, qu’on aime mixer avec la modernité de l’inox dans la cuisine. Et des objets de couleur, des vases, des bouquins. Dans la vie comme dans la déco, on privilégie ce qui a du sens. » Tout semble ici avoir été consciencieusement chiné, de manière réfléchie et locale : l’immense table à manger provenant de l’abbaye voisine de Sainte-Marie de la Pierre-qui-Vire, trouvée chez l’antiquaire Patrice Gastineau, les vases de la boutique avallonnaise La Crème, ou les chaises en bois et la suspension de la cuisine dénichées chez La Lune à Dijon. Entre ces murs chargés d’histoire, Manon et Quentin écrivent la leur à leur rythme : « Le hall reste à finaliser, mais il faut qu’on définisse ce à quoi il va servir avant de terminer cette partie. Il y manque une pièce forte au mur, mais on attend un coup de cœur pour l’habiller. Ça prendra le temps qu’il faudra, mais on préfère fonctionner ainsi plutôt que d’acheter pour acheter. Le vide ne nous gêne pas. L’accumulation de pièces qui n’ont pas de sens, si. C’est important de savoir prendre le temps. »

Sobriété heureuse

Mobilier durable, pépites chinées et objets de cœur pour maison de famille pleine de sens.

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Article à retrouver dans le HOME Magazine n°108 (novembre-décembre 2023), disponible en kiosque
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